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VIP-Blog de happy-halloween
  • 34 articles publiés dans cette catégorie
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  • Créé le : 08/10/2007 00:27
    Modifié : 14/12/2023 03:49

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    Je reviens d'entre les morts...

    04/04/2008 03:47

    Je reviens d'entre les morts...


    Je reviens d'entre les morts....

    «A la suite de fatigues longtemps soutenues, je fus atteint d'une fièvre nerveuse qui épuisa rapidement le reste de mes forces.

    Chose étrange ! Il me semblait que la vie, qui abandonnait peu à peu mon corps, se réfugiait toute entière dans mes facultés morales.

    Réduit au dernier degré de l'atonie physique, jamais je n'avais éprouvé plus de force ou même d'exaltation morale.

    Le moment de la crise définitive arriva : je me sentis comme emporté dans un tourbillon lumineux au milieu duquel flottaient les figures les plus fantastiques, tandis que mon corps était agité de frissons couvulsifs et que retentissaient à mes oreilles les éclats et les sifflements d'une affreuse tempête.

    Je me cramponnai de toutes mes forces à la vie qui paraissait vouloir m'échapper, lorsque enfin mes sensations devinrent si confuses, que je m'abandonnai malgré moi à cet état qui n'était pas sans quelque douceur, et je perdis bientôt tout sentiment de l'existence.

    Je ne sais combien de temps je restais ainsi, quand tout à coup je me réveillai dans un calme presque extatique: mon corps était parcouru par une foule de sensations voluptueuses et mes sens, ainsi que mon intelligence, m'étaient complètement rendus...

    En ce moment le médecin, s'étant approché de mon lit, laissa échapper ces mots : « Tout est fini ! »

    Puis il recouvrit ma figure d'un drap, et mes oreilles furent frappées par les sanglots de ma famille éplorée.

    Alors je voulus parler, faire un mouvement. Je sentis avec horreur que ma langue était fixée à mon palais et que mes membres, qui percevaient le contact des couvertures qui m'enveloppaient, enlacés par d'invisibles liens, se refusaient à exécuter le moindre mouvement.

    Dès le lendemain et durant trois jours, je restai exposé pendant que les amis de la famille venaient faire leur visite de condoléance.

    J'entendais et je comprenais tout ce qui se passait autour de moi et, de minute en minute, j'espérais vainement que le charme fatal qui pesait sur moi allait être brisé.

    Le matin du quatrième jour, je fus remis aux mains des ensevelisseurs qui me traitèrent avec la plus révoltante brutalité; et lorsque l'un d'eux, pour me faire entrer dans une bière trop étroite, pressa de son genou ma poitrine, j'éprouvai une si cruelle torture que j'eus l'espoir un instant que la possibilité d'exprimer ma souffrance allait m'être rendue.

    Il me fallut encore y renoncer. La bière fut recouverte et j'entendis bientôt le grincement des clous qui s'enfonçaient lentement dans le bois.

    Il me serait impossible de trouver les termes pour exprimer ce que mon âme contenait alors de terreur et de désespoir. Chaque coup de marteau vibrait douloureusement dans ma tête comme un glas funèbre m'annonçant le destin qui m'était réservé.

    Encore si j'avais pu crier, si, même sans espoir d'être entendu, j'avais pu pousser quelques gémissements  !...

    Mais non ! Tandis que ma poitrine et mes épaules étaient écrasées dans un espace étroit, tandis que je sentais ma tête et mes membres meurtris et déchirés par le dur contact et par les aspérités de la bière, il me fallait rester immobile et sans voix.

    Je n'aurais jamais cru que, sans se briser, un coeur pût être labouré par d'aussi épouvantables angoisses.

    Bientôt on me souleva, on me déposa sur le char funèbre qui se mit en route et on arriva au cimetière.

    A ce moment, je voulus tenter un dernier effort mais ce fut toujours en vain. Je me sentis balancer au-dessus de la tombe qui allait m'engloutir et tandis qu'on me descendait lentement, je distinguais le bruit que faisait le cercueil en froissant les quatre murailles de terre.

    Quand je fus parvenu au fond de la fosse, j'entendis la voix grave et solennelle d'un ami. Il m'adressait un tendre adieu qui parvint jusqu'à moi comme un dernier écho des bruits de la terre.

    Et bientôt un fracas épouvantable, qui s'éteignit peu à peu comme des roulements lointains de tonnerre, m'annonça que ma tombe venait d'être comblée.

    Tout était donc fini ! J'étais pour jamais séparé des vivants. Comment ne suis-je pas mort en cet instant terrible ?...

    Je ne sais combien de longues heures je restai ainsi. J'avais espéré que mes angoisses seraient brèves et qu'une prompte asphyxie éteindrait, et mes sensations, et mon existence.

    Je m'étais encore trompé. Je ne pouvais faire aucun mouvement, mon coeur ne battait plus, ma poitrine n'était soulevée par aucune inspiration et pourtant je vivais !

    Car je souffrais ! Je vivais ! Mon intelligence et ma mémoire n'avaient rien perdu de leur énergie...

    Cependant, mes tristes pensées furent interrompues par un bruit lointain qui d'abord me plongea dans une grande anxiété.

    Le bruit se rapprocha insensiblement et je sentis mon cercueil arraché des entrailles de la terre. On l'ouvrit et je perçus l'impression d'un froid pénétrant; impression qui me parut pourtant délicieuse, illimitée qu'elle était par un rayon d'espérance.

    On me transporta longtemps puis on me laissa tomber lourdement sur un marbre humide et glacé.

    J'entendis autour de moi une multitude de voix. Des mains me palpaient en tous sens, et un de mes yeux ayant été ouvert par hasard, je me vis au milieu d'un amphithéâtre de dissection et entouré d'un grand nombre de jeunes gens, parmi lesquels je reconnus deux de mes anciens compagnons de plaisir.

    Je ne saurais dire si, en cet instant, la terreur l'emportait en moi sur la joie. Certes ma situation était devenue moins cruelle car il pouvait se faire que les expériences auxquelles on allait me soumettre me rendissent à la vie ou du moins me donnent promptement la mort.

    On résolut d'abord de me soumettre à un courant électrique. L'appareil fut préparé et à la première décharge de fluide, mille éclairs jaillirent devant mes yeux et une commotion terrible ébranla tout mon être.

    Une seconde décharge fut plus énergique encore; je sentis tous mes nerfs vibrer comme des cordes d'une harpe et mon corps se dresser sur son séant, les muscles contractés, les yeux ouverts et fixes.

    J'aperçus en face de moi deux amis dont les traits exprimaient l'émotion de la douleur et ils demandèrent avec insistance que l'on mît fin à ces hideuses expériences.

    On m'étendit sur la table de marbre. Le professeur s'approcha de moi, le couteau à la main et me pratiqua une légère incision sur les téguments de la poitrine...

    Au même moment une révolution épouvantable s'opéra dans tout mon corps, je parvins à pousser un cri terrible en même temps que les assistants laissaient échapper des cris d'horreur. Les liens de la mort étaient brisés : j'étais rendu à la vie.

    FIN








    L'enterrement de l'oncle

    04/07/2008 23:14

    L'enterrement de l'oncle


    L'enterrement de l'oncle

    Marie Creac'headic, jeune fille de quinze à seize ans, était servante à la ferme de Kervézenn, en Briec. Non loin de Kervézenn, s'éteignait doucement, dans une chaumière isolée, un vieillard aveugle qui était l'oncle de Marie, à la mode de Bretagne, et à qui elle allait quelquefois faire visite.

    Un matin, elle s'en revenait de Quimper, où elle avait coutume d'aller chaque jour porter du lait, avec une petite voiture à bras. On était en hiver et il faisait à peine jour.

    Marie se trouva tout à coup devant un char à bancs, dont un paysan, qu'elle reconnut, conduisait le cheval par la bride. Elle n'eut que le temps de se garer, avec sa voiture, dans la douve.

    Le char à bancs passa : elle vit qu'il contenait un cercueil. Derrière, venait le porteur de croix, puis un prêtre, le recteur de Briec, et enfin le cortège funèbre. Marie ne fut pas médiocrement surprise de voir que le deuil était mené par les plus proches parents de son oncle aveugle.

    - Allons, se dit-elle, il paraît que mon oncle est mort.

    Elle rentra à Kervézenn, tout attristée, un peu dépitée aussi qu'on ne lui eût pas fait part de la mort du pauvre vieux, qu'elle aimait beaucoup.

    La maîtresse de maison, remarquant qu'elle avait l'air tout drôle, lui demanda :

    - Qu'est-ce donc qui vous est arrivé, Marie ?

    - Il m'est arrivé que je viens de croiser le convoi funèbre de mon oncle, et qu'on n'a pas daigné me faire part de sa mort.

    La maîtresse de maison se mit à rire.

    - Vous avez rêvé, ma fille; car, certes, vous n'étiez pas bien réveillée quand vous avez vu ce que vous dites. Si votre oncle était mort, on l'aurait su dans le quartier.

    - Eh bien, répondit Marie, j'en aurai le coeur net !

    Et elle alla, d'une course, jusqu'à la chaumière.

    Elle y trouva le vieil aveugle, couché, comme à son ordinaire, dans le lit clos, auprès de l'âtre. Seulement il avait la face toute jaune et ne respirait presque plus.

    Une de ses filles qui était là, avec d'autres parents, invita Marie à se joindre à eux pour la veillée, cette nuit-là, en ajoutant que ce serait sans doute la dernière.

    Elle ne manqua pas de s'y rendre.

    Comme elle était un peu fatiguée de sa journée, elle s'assoupit, au bout d'une heure ou deux. Soudain, il lui sembla que quelque chose de lourd venait de heurter contre la porte. Elle se réveilla en sursaut, et s'aperçut que les autres veilleurs, eux aussi, dormaient d'un sommeil profond.

    La porte cependant s'était ouverte.

    Marie vit entrer un cercueil qui fut déposé par des mains invisibles sur le marche-pied coffre qui se trouve au bas du lit.

    Elle eut grand-peur et se tint bien coite à la place où elle était assise. Elle serra même très fort ses paupières sur ses yeux.

    Mais, quand elle ne vit plus, elle entendit..., elle entendit les mains mystérieuses fourrager dans le cercueil parmi les rubans de bois ou ripes qu'on étend sous les cadavres et le chanvre peigné qu'on tord en guise d'oreiller sous leur nuque.

    En ce moment, l'oncle fit un long soupir.

    A l'aube, on constata qu'il était déjà froid.

    Marie Creac'hcadic s'en fut à Kervézenn, le coeur chaviré, prier qu'on voulût bien lui permettre d'assister à l'enterrement. Mais la maîtresse de maison lui fit observer que les pratiques de la ville attendaient leur lait, qu'elle n'était d'ailleurs que la parente éloignée du mort et qu'elle s'était suffisamment acquittée envers lui en le veillant toute une nuitée.

    La pauvre fille dut se résigner. Elle s'attela à la petite voiture et se dirigea vers Quimper. Elle rencontra l'enterrement le vrai, cette fois au même tournant du chemin où elle avait déjà croisé l'autre.

    Craignant qu'on ne lui fît reproche pour n'être pas venue se mêler au cortège, elle se jeta dans un champ dont la barrière était ouverte.

    Elle attendit là, en regardant à travers les ajoncs du talus, que le convoi se fût éloigné. Elle s'apprêtait à quitter sa cachette, quand elle fut clouée sur place de stupeur.

    Voici que, par la route, s'avançait, d'un pas hésitant, un vieux à la figure jaune comme cire, et c'était son oncle, son oncle l'aveugle, qui suivait à distance son propre enterrement.

    Pour le coup, Marie Creac'hcadic s'évanouit d'épouvante. Des gens qui passaient par le champ la trouvèrent une heure plus tard, qui gisait dans le fossé. Ils la rapportèrent à Kervézenn, à demi morte.

    FIN







    Histoire : La Désirade

    07/07/2008 03:14

    Histoire : La Désirade


    La Désirade

    Un jour gris, à Paris….

    L’appartement était vide. Bien rangé. Tout à sa place. Un peu triste d’être si solitaire. Les rideaux de satin rose thé, à demi tirés. Le jour était hivernal, le ciel parisien d’un gris uniforme. En bas, le quartier avait l’animation d’un lundi. Seule, la croix verte du pharmacien, au coin de la rue, clignotait. Sa lumière froide se reflétait sur le trottoir. Il venait de pleuvoir.

    L’homme laissa retomber le rideau et se retourna pour inspecter les lieux. Marie lui avait laissé les clefs. Sans qu’il sache au juste pourquoi : ils ne venaient jamais chez elle pour faire l’amour. Ni d’ailleurs, pour quoi que ce soit. Pas même, pour boire un verre. Et elle n’avait ni poisson rouge, ni plante verte à arroser, ni chat à nourrir en son absence. De toute façon, la femme de ménage passait une fois par semaine, pour jeter un coup d’oeil et épousseter un voile de poussière imaginaire.

    Son regard fit le tour de la pièce. On eût dit une chambre d’hôtel. Le couvre-lit mauve était bien tiré. L’oreiller unique, sagement posé dessus, trônait au beau milieu du lit, bien gonflé. Pas une peluche, pas l’ombre d’une poupée, ni même une fleur. Rien pour accrocher le regard, rien pour l’émouvoir, excepté deux petits détails troublants : la femme de ménage avait laissé ses babouches sur la descente du lit. Et une bouteille de parfum, à demi entamée, sur la table de nuit. A part cela, rien qui soit susceptible de le rassurer. De la lui rappeler. De combler le manque qu’il avait d’elle. De lui mettre un baume au coeur.

    Il scruta une dernière fois ce lit, où il n’avait jamais été invité à se coucher et il l’imagina, nue, abandonnée, douce et chaude, lovée entre ses bras. La douleur lui transperça la poitrine. Aiguë, comme la lame d’un couteau. Elle était partie pour sa propriété de la Désirade, là bas au bout du monde, dans les Antilles françaises. Où son père, jadis, avait dirigé une exploitation de canne à sucre.

    C’est à peine si elle lui avait dit au-revoir ou à bientôt. Ni pourquoi, elle partait. Elle avait besoin de faire le point, de respirer. De se “retrouver,” avait-elle expliqué. Et elle l’avait planté là, en lui disant. “Tiens, je te laisse mes clefs. Si tu veux, tu pourras venir faire un tour chez moi, installe-toi, fais comme chez toi. Tu te sentiras moins seul !”

    Pour elle, tout était simple. Tu parles ! Seul, n’était pas le mot qui convenait. Ni même “abandonné,” c’était pis. Bien pis. C’était comme si elle l’avait dépossédé de lui même, comme si elle avait emporté sa vie avec elle, pour laisser à Paris, un pantin désarticulé. Il n’avait plus de goût à rien. S’était fait porté malade, à l’hôpital où il travaillait comme infirmier, et errait, maintenant, comme une âme en peine.

    Le vers de Lamartine, appris jadis en classe, lui trottait dans la tête : “un être vous manque et tout est dépeuplé.” C’était vrai à en sangloter. A se taper la tête contre ces murs vides. Soudain, un objet insolite dans cette pièce, arrêta sa mélancolique humeur. L’intrigua, titilla son intérêt, éveilla sa curiosité. Trop occupé jusque là, à remuer des pensées moroses, il ne l’avait pas vue. Une enveloppe rectangulaire était posée debout, légèrement inclinée, sur le secrétaire. Comme fasciné, il s’en approcha. Elle était de couleur ivoire. Assez grande. Faite d’un joli papier, du genre raffiné, et adressée à Marie d’Orban.

    Son adresse avait été rédigée à l’encre bleue. L’écriture était soignée. Il saisit l’enveloppe entre ses doigts. La retourna. Pas d’adresse au dos. Il tenta d’en percer le mystère, en la tournant vers le jour et en essayant de voir ce qu’il y avait à l’intérieur. Mais le papier était doublé, et opaque. Il la secoua. Elle n’émit aucun bruit. Il la reposa, découragé. Puis, il eut une idée : il chercha ses lunettes et déchiffra le tampon de la poste. Quimper ! L’enveloppe avait été postée la semaine dernière, et venait de Bretagne. Avait-elle de la famille là-bas ? Elle ne lui en avait jamais parlé. Une amie, peut être ? Il huma le papier. Qui sait ? Peut être, était-il parfumé ? Non, même pas.

    L’enveloppe gardait son secret. Il la reposa. Jeta un oeil à sa montre : onze heures, et pensa à son service à l’hôpital, où son absence devait se faire cruellement sentir. On était en manque de personnel. La matinée était avancée. Normalement, il aurait hélé un taxi, se serait précipité dans le métro, pour rattraper son retard. Mais il était sans force. Et tout lui était égal. Il soupira, et décida en désespoir de cause, d’aller à la cuisine se faire un café. La kitchenette était petite, mais aussi nette et propre que le reste de l’appartement. Il ouvrit un placard, trouva le café, versa l’eau. Fit une petite flaque par terre, qu’il omit d’éponger. Il s’alluma une cigarette, en attendant que son café fût prêt. Secoua ses cendres dans l’évier, et se versa une tasse. Le café embauma, mais cela ne l’apaisa guère. Il en but une gorgée. Reposa la tasse, et retourna dans la chambre.

    L’enveloppe l’intriguait trop. Elle était là où il l’avait laissée. Il l’a prit. L’emporta avec lui, comme un objet rare et précieux, la posa sur la table de la cuisine et finit de siroter son café, en faisant bien attention de ne pas la tâcher. Il la regardait, comme si elle le narguait. Il ne supportait pas que Marie pût avoir une vie d’où il était exclu. Ce courrier, il fallait qu’il en brise le sceau, s’en approprie le contenu. Mais, l’enveloppe ne lui était pas destinée. Ce n’était pas convenable. Il le savait. Mais sa curiosité, son impérieux besoin de savoir, de percer le secret, le broyait.

    Il prit la bouilloire, la remplit d’eau et la posa sur le feu. Lorsqu’elle émit son joyeux sifflement, il laissa un peu de vapeur s’échapper, et entreprit de décoller soigneusement l’enveloppe. Dans sa hâte, il ne s’était même pas aperçu qu’elle n’était pas fermée. Le revers était simplement glissé à l’intérieur. Il le souleva, intrigué et vaincue, celle-ci se livra au violeur. Avide et gourmand, celui-ci eut toutes les peines du monde à maîtriser ses gestes. Il avait envie d’extraire sans ménagement le feuillet glissé à l’intérieur. De s’en saisir, quitte à tout déchirer. La page unique, fut bientôt dépliée. D’une main fébrile, il ajusta ses lunettes. En haut à gauche, il y avait un nom et une adresse, celle du mystérieux expéditeur : Clément Sablé, 12, impasse des infortunées, Quimper. Pas de numéro de téléphone et une drôle d’adresse. Son regard s’empara de l’intitulé : “Très chère Marie !” Que voulait donc ce garçon à son amie ? Il grillait de l’envie d’en savoir plus, et lut sans plus attendre :

    “Mon Dieu ! Quel bonheur d’avoir pu retrouver votre trace. De vous avoir enfin rencontrée. Depuis que je rêvais de vous ! Que je vous imaginais, belle, suave, tendre, douce, en un mot, fabuleuse. Mais la réalité dépasse tous mes rêves. Vous êtes si magnifique, que je souffre à l’idée de tout ce temps qui nous a été volé par la vie, et que je souhaite ardemment rattraper ! Où êtes vous, Marie ? Je n’arrive pas à vous joindre. Depuis notre rencontre au jardin du Luxembourg, votre portable ne répond pas et votre femme de ménage m’a dit que vous étiez sur le point de vous envoler vers les Antilles. Je souhaite sans plus attendre, vous connaître mieux, même s’il est trop tôt pour que je vous appelle autrement que par votre prénom. Me laisserez-vous vous approcher un tout petit peu ? Je saurai me faire discret, ne pas vous importuner. Je ne veux ni vous encombrer, ni vous déranger, ni bousculer vos habitudes. Je respecte votre choix. Mais j’ai tant besoin de vous. Vous laisserai-je vous envoler une nouvelle fois vers quelques cieux inconnus et vous perdre à nouveau ? Laisserai-je le livre de la vie écrire de nouveaux chapitres, où je ne serai pas ? Une nouvelle vie nous attend Marie, où tous deux, nous découvrirons des horizons merveilleux, jusque là hors de notre portée. Une dimension nouvelle.

    Je n’eus jamais cru qu’il me serait possible de vous retrouver. Je vous découvre et c’est le plus beau des cadeaux !

    Pour mieux vous reperdre, et c’est mon sang qui se glace. Je sais, je suis sans doute trop impatient. Que voulez-vous, j’ai l’impétuosité de ma jeunesse. Mais j’espère que vous saurez me pardonner. Je désespère de ne pouvoir vous joindre au téléphone. Répondez-moi vite ! Pourrions-nous nous voir encore, avant votre départ ? Je bous d’impatience ! Sans réponse de vous, je suis capable de tout, y compris d’aller vous surprendre dans votre repère secret du bout du monde, là-bas, dans ces Antilles lointaines, même si je ne connais ni votre adresse, ni rien de ce pays. Je saurais bien vous dénicher et vous offrir tout mon amour, si vous l’acceptez, bien sûr ! Car je ne saurais m’imposer à vous, quand bien même, cela me briserait le coeur. Comprenez-vous l’urgence que je ressens de vous serrer sur mon coeur ? Je l’espère ! Je brûle d’impatience. Répondez moi vite, ma M….. chérie – - – ! (Je n’ose pas prononcer ce mot chéri. J’attends que vous me l’appreniez !) Votre Clément !

    L’homme n’en croyait pas ses yeux. L’inimaginable s’était produit : elle le trompait, lui mentait, le trahissait ! Pendant que lui se rongeait d’angoisse et de désespoir durant son absence, elle entretenait avec ce Clément une relation qui ne laissait que trop deviner une passion amoureuse des plus ardentes. Du moins, de sa part à lui. Mais elle ne semblait pas pour autant innocente. Elle l’avait rencontré au parc, lui avait parlé, l’avait probablement séduit, envoûté par son charme, qu’il ne connaissait que trop bien. Et elle, elle jouait les filles de l’air, l’enjoleuse…la garce ! Une haine farouche le submergea. Il ne savait plus où il en était. Cinq minutes avant, il l’adorait. Se sentait meurtri, de ne pouvoir la presser sur son coeur, souffrait dans sa chair la brûlure de son absence. Le parfum de ses cheveux, doux comme de la soie, la douceur de son cou gracile, qui se courbait sous ses baisers, sa nuque souple, son menton mutin, son sourire ravissant…lui manquaient, à en perdre la raison. Tout lui disait la peine et le chagrin dans lequel il se trouvait précipité, du fait de son départ. Et à l’instant même, il l’eut volontiers giflée et rouée de coups, avec la même violence qu’il l’eue étreinte, deux minutes avant !

    Il écrasa son poing contre le mur et ses jointures furent en sang. Cela lui fit mal. Le libéra. Il se sentit mieux, et put à nouveau respirer. Il saisit sa veste, ramassa les clefs et claqua la porte derrière lui, sans même la refermer, en emportant l’infamante enveloppe. Laissant à la femme de ménage, la tasse et la flaque à nettoyer.

    Il la detestait. Il haïssait Marie ! Il en voulait au monde entier, et se serait volontiers jeté contre un mur pour se blesser, s’il n’avait eu peur de la souffrance. Non, il valait mieux se venger. Cela le soulageait davantage, même s’il fallait attendre un peu. Mûrir un plan. Arrêter une stratégie. L’imposteur, ce Clément de m… qu’il maudissait, il en était sûr, l’avait rejointe là bas, sous le soleil des tropiques et, en ce moment même, sournois, les deux amants filaient le plus parfait amour, le laissant lui, glacé, torturé, seul. Sans présent et sans avenir. Elle lui avait volé sa vie ! Son amour ! Elle l’avait trahie. Elle méritait cent fois la mort. Il vit rouge. Il avait un besoin de sang. Tuer, n’importe qui, ou quoi, l’eut soulagé. Mais c’était un timoré. Il avait peur. Il se sentait piégé, petit, faible et sans force. Seule, sa haine, féroce, l’habitait.

    Il rentra chez lui, prit une douche dans l’espoir que l’eau chaude coulant sur son corps, lui ferait un instant oublier la morsure qu’elle lui infligeait. Mais le remède fut d’un faible effet. Il se regarda dans la glace : un peu maigrelet, ni petit ni grand, mais un visage régulier, des yeux bleus, très pâles, qui avaient su fasciner Marie. Un nez droit. Rien de bien extraordinaire, mais rien de repoussant non plus. Non, un comme tout le monde, mais dont les cheveux blonds lui parurent soudain trop flous, lui faisant un visage de bambin, pas assez dur ! Il saisit des ciseaux et entreprit de tailler à même sa chevelure. Des touffes de cheveux tombaient sur le carrelage. Il eut vite l’aspect d’un chien au poil hérissé et ses touffes pâles et hirsutes qui pointaient et se dressaient sur son crâne, le firent sourire. Il serait bien resté comme ça, mais pour passer inaperçu, ce n’était pas l’idéal. Alors, il se saisit d’un rasoir. Voilà ! Son aspect était plus militaire, plus rude, désormais. Il chercha un bonnet gris dans sa panoplie de sport d’hiver et s’en couvrit le chef. Après quoi, il dénicha dans la penderie un vieux sac à dos, datant de son époque scout et y jeta sa trousse de toilette et une serviette de bain. Il ajouta un jean propre, deux paires de chaussettes, un tee shirt, un slip de rechange et un livre de poèmes, qu’il prit dans sa bibliothèque. Les poèmes avaient le don de le calmer. Il n’oublia pas son baladeur MP 3, enfila un jean, un pull gris, un anorak noir, ramassa, son portefeuille, ses clefs de voiture et ses cigarettes. Ainsi paré, il jeta un dernier regard à la glace et vit un jeune homme comme des milliers d’autres. Parfait, personne ne le remarquerait. Il se ferait aussi gris, qu’un chat gris, dans un tunnel gris. Il ferma soigneusement sa porte à double tour, serrant la compromettante enveloppe dans sa poche. Descendit au parking, où l’attendait sa Clio noire. Il démarra en trombe et sortit.

    Il prit la direction de l’hôpital, se dirigea vers son vestiaire, et enfila sa blouse blanche. Il agrafa son badge officiel qui lui permettait toutes les allées et venues. Il savait exactement où trouver ce qu’il cherchait, ouvrit le tiroir, se saisit d’un trousseau de clefs. L’ armoire à pharmacie se trouvait dans la même pièce. Il l’ouvrit, s’empara d’une fiole et de deux ou trois seringues à jeter. Il valait mieux se montrer prudent. Il referma la porte à clef derrière lui. Remplit un registre spécial, où l’on inscrivait les emprunts et le signa, avec la date du jour. Il n’était pas censé être là aujourd’hui, mais l’avenir, il n’en avait cure. D’ailleurs, d’avenir, il n’en avait plus. Comme il se fichait de savoir ce que son chef allait penser. Il avait bien d’autres chats à fouetter ! Il retourna au vestiaire, ne croisa personne qui le reconnut et redescendit au parking. De là, il se rendit à l’aéroport et acheta un billet pour Pointe-à-Pitre. Il y avait juste une place de libre dans l’ avion du lendemain midi. Au fond de l’appareil.

    Il n’eut pas envie de retourner chez lui. S’offrit une place de cinéma. S’attabla à la terrasse d’un bistro. Mangea un sandwich, bercé par son MP 3, fuma cigarettes sur cigarettes et s’endormit sur un banc. Il passa une fort mauvaise nuit, mais cela n’avait pas d’importance.Il rendit visite aux toilettes d’un bar, pour se faire un visage présentable, s’aspergea de déodorant, puis prit la direction de Roissy et fit enregistrer son maigre bagage. Il acheta un ou deux journaux. Tua le temps comme il put, en observant les autres passagers, les couples, les familles, les enfants. Mais il ne pensait à rien. Il ne pouvait plus penser. Ni lire un poème. Ni réfléchir, car rien n’avait plus ni queue ni tête. La salle d’embarcation était noire de monde.La vie était une farce. Enfin, on appela les passagers à monter dans l’avion. Il suivit la foule, se laissa fouiller rituellement, présenta sa carte d’identité. Tout alla pour le mieux. Il avait la mort dans la tête, dans le coeur, dans l’âme, mais heureusement, ça ne se voyait pas. Il rejoignit son siège, boucla sa ceinture et attendit que le gros porteur s’arrachât de la piste pour emporter son lot de vacanciers vers des cieux plus clairs. Il s’endormit. Non pas qu’il se sentît mieux ou apaisé, mais il était fatigué. Épuisé. Il essaya de penser à la traîtresse qui avait bousillé sa vie, mais ses traits s’effaçaient. Il ne sentit que la douleur qui lui serrait la poitrine. Comme un étau brûlant. Il mangea sans faim son plateau repas, regarda le film sans le voir et s’assoupit. L’avion atterrit sans encombre, mais trop tard dans l’après midi, pour qu’il pût attraper le bateau vers la Désirade.

    La petite île, langue de verdure bordée de sable blanc et baignée d’eaux bleues, saurait bien l’attendre un jour de plus. Les touristes, dont il se fichait, s’égaillèrent vers leurs résidences de vacances, les autochtones se retrouvèrent, s’embrassèrent. Lui, se dirigea vers le port. Il y avait des gens qui grouillaient, des carcasses de voitures en décomposition qui, telles des charognes modernes, finissaient de pourrir dans le fossé, sous les fleurs qui tombaient dessus en cascades, sans que nul ne s’en souciât. Il se sentit en harmonie avec ces cadavres de taules et de métal, pliés, rongés, torturés. Des bateaux revenaient au port, vomissaient leurs passagers et marchandises dans la toufeur de l’après midi. Des cabanes de bois mal ajustées le regardaient passer dans l’indifférence. Il y avaient des filles souples comme des lianes, des motocyclettes pétaradantes, des boutiques pleines de paréos qui lui rappelaient des souvenirs de vacances qui lui firent mal et des papiers qui s’entassaient dans le caniveau. Une saleté crasse en harmonie avec son humeur.

    Le soleil lui caressa la peau, mais il l’ignora. La mer au loin, s’assombrissait déjà. Le bleu du ciel s’éteignit aussi soudainement qu’une bougie. Et il chercha un bar pour s’offrir la douceur de la brûlure du rhum. Il but plus que de raison, mais pas au point d’en perdre la tête. Avala une pizza. Et chercha un endroit pour passer la nuit. Un endroit à l’écart, au bout d’une ruelle, aussi sombre que le cul d’une négresse. Il y avait des bateaux de pêche renversés, des filets, des bouées, des objets hétéroclites abandonnés. Il se glissa sous une barque‚ à demi inclinée sur le côté, roula son sac en oreiller et s’endormit d’un sommeil qui n’était pas celui du juste. Le jour naissant le surprit reposé. L’horizon se teintait de rose, de mauves suaves qui se dissolvaient dans un fleuve de lumière orangée. Et celle-ci virait au bleu à une vitesse saisissante. Mais ce festival de couleurs ne sut pas ranimer la moindre flamme de plaisir en lui. Le moindre espoir. La plus petite joie. Il était aussi mort qu’on peut l’être, et ne souffrait pas que la vie, autour de lui, lui fît fête. Il était de mauvaise humeur. La faim le talonnait. Il s’offrit un petit-déjeuner de marin, du café noir et une rasade de rhum. Prit son billet aller-retour machinalement pour la Désirade, et attendit que les marins lui fassent signe de monter à bord.

    Il y avait là, une armée de touristes en vadrouille avec armes et bagages, des jeunes à boucles d’oreilles, qui s’interpellaient, riaient au vent, des enfants qui criaient, des amoureux qui s’embrassaient en se tenant la main, des mamans serrant des bébés dans leur bras, des couples plus âgés, qui agrémentaient leur retraite d’un peu de soleil et d’azur, s’offrant un hiver au soleil sous les cocotiers. Bref, une foule joyeuse, colorée et bavarde qui se calma quand le bateau eût atteint la pleine mer. La houle était forte et il fallait prendre garde à ne pas rendre son petit-déjeuner. Le bateau, gaillardement, dévalait les creux, escaladait les bosses, semblait prendre son élan pour gagner les nuages et retombait lourdement, dans un platch qui enthousiasmait les enfants au coeur bien accroché. L’homme aux sombres pensées, s’était terré sur son siège de plastique rouge et faisait sembler de regarder le film américain qui passait à la TV. Le bateau accosta. Des hommes brandissant des pancartes et offrant, qui une voiture à louer, un 4×4, des scooters ou des visites guidées de l’île, attendaient les touristes. Il se mêla au flot joyeux qui débarquait, repéra un gamin qui lui indiqua une baraque où une vieille à moitié myope, et qui ne parlait que créole, lui loua un scooter, avec le plein d’essence. L’affaire entendue, il enfourcha l’appareil et chercha la poste.

    Le port n’était pas bien grand et il dénicha le bâtiment sans effort. Là, il demanda le préposé, lui montra la photo de Marie, donna son nom et expliqua qu’il avait oublié de prendre son adresse, qu’il voulait lui faire une surprise. Le facteur sourit, en découvrant toutes ses dents et lui indiqua le village où son amie avait sa résidence. A l’intérieur de l’île. Il prit une petite route qui musardait dans la verdure, contournait des champs de cannes et escaladait des collines sauvages où s’éparpillaient des habitations.

    Les fourrés, et les arbres faisaient une végétation dense et touffue à laquelle il n’aurait pu donner aucun nom. Son scooter dérangeait en passant le calme d’une campagne assoupie sous le doux soleil tropical, chaud comme un petit pain au sortir du four. La mer scintillait, et venait briser, au loin, sur la barre de corail, ses rouleaux qui éclataient en écume mousseuse. En deçà, la lagune paressait et poussait de lentes vaguelettes qui venaient mourir sous les cocotiers qui penchaient.

    Il n’eut pas un regard pour la plage blonde au sable doux où s’aventuraient des iguanes peu sauvages. Ni pour les rares touristes qui se plaisaient à rejouer Robinson Crusoé et Vendredi. Ni pour les enfants qui cherchaient à dénicher sous les raisins de mer, des coquilles nacrées ou des coraux blanchis. Il prit un chemin de traverse, et aperçut un versant légèrement incliné où se nichait une vieille bâtisse. La masion d’allure coloniale, semblait avoir connu un passé plus prospère. Une galerie tournait autour d’elle, et il semblait qu’elle était inhabitée. Le jardin croulait sous une avalanche de plantes, des lianes s’entortillaient autour d’autres troncs qui ne semblaient pas étouffer pour autant, et redéployaient en tombant, de larges feuilles vernissées, aussi généreuses que des ailes d’anges déployées.

    Tout était calme. Il ne s’annonça pas. S’introduisit dans l’habitation assoupie, tel le voleur de vie qu’il était. Etouffa jusqu’au bruit de ses pas, et se faufila sur la terrasse. Une baie ouverte laissait se gonfler un rideau blanc qui se croyait une voile, s’enflait et se dégonflait, dans un rythme lent et paresseux, incitant à la sieste ou à l’amour, dans la quiétude de l’après midi. Il se fit ombre, se cacha dans l’encoignure d’une porte, et osa jeter un oeil sur le lit défait, où dormait paisiblement celle dont les caresses avaient, en disparaissant, retiré au ciel toutes ses couleurs. La traîtresse, en ses cheveux épars et défaits, faisaient songer à une Vénus émergeant de l’écume dans le premier matin du monde, aussi innocente qu’une nymphe appelant l’amour. Mais la fleur était vénéneuse et toxique. L’homme ouvrit son sac en silence, en sortit un flacon et une seringue. Aspira un liquide transparent, fit jaillir une goutte au bout de l’aiguille et, tel un serpent, s’approcha du bras blanc et le piqua avec une adresse de serpent. Elle n’eut pas un soupir, pas un râle, pas un soubresaut. Elle passa en souriant du monde des rêves à celui des anges. On n’eut pu rêver une mort plus douce, regretta-t-il. La traîtresse eut dût souffrir les mille morts du remord, cela eût été plus juste. Mais l’homme n’avait pas encore assouvi sa vengeance. Il fallait qu’il entende les hurlements de l’enfant de salaud qui lui avait ravi sa maîtresse, la découvrant morte en ses draps blancs, où il viendrait se couler, tôt ou tard. Au point où il en était, l’homme n’avait plus qu’à attendre. Il s’appuya sur le mur, se laissa glisser et s’assit, dans la pénombre du jour qui déclinait. En bas, quelqu’un avait allumé des lampes et s‘affairait autour d’une table. Il entendait des verres qui teintaient, des bruits de bouteilles qu’on débouchait, le chant des glaçons dans des verres. Soudain, un cri joyeux déchira le silence.

    “Maman “ ! Maman ! Réveille toi . Je viens de nous servir un “ti punch” ! Avec plein, de glaçons, comme tu l’aimes ! “ Le silence répondit à l’appel. L’homme se pencha effaré et vit un jeune homme d’une vingtaine d’années à la crinière blonde, reposer le verre qu’il tenait à la main et se lever.

    Il l’entendit monter l’escalier quatre à quatre, et entrer dans la chambre. Allumer la lumière, lorsqu’un cri de bête déchira le ciel de la nuit.
    “ Maman, maman ! Mais réveille toi, bon sang !”
    Les sanglots étaient déchirants. A vous vriller le coeur. Mais pourquoi appelait-il sa mère, cet enfoiré ? L’homme resta un bon moment plaqué contre le mur, se bouchant les oreilles. Entendant le jeune homme appeler les pompiers et la police tout ensemble. Il sauta dans la nuit du jardin envahi de ténèbres, disparut dans les sombres frondaisons et retrouva son scooter, qu’il avait laissé appuyé contre un tronc. Il le poussa sans bruit jusque loin sur la route, ne souhaitant pas se retrouver face à face, avec les représentants de l’ordre.

    L’angoisse, la confusion, l’habitaient. Qui était ce jeune homme ? Etait-ce le Clément de la lettre ? Se pouvait-il qu’il eût tué sa bien aimée pour rien ? Simplement, parce qu’elle lui avait caché qu’elle avait un grand fils ? L’horreur de son geste, l’angoise commençait à étendre ses tentacules monstrueuses, enserrant sa gorge et son coeur, dans un étau insupportable. Il se jeta dans un fourré au bord de la route, espérant que les ténèbres allaient étouffer sa souffrance. Il entendit le concert des sirènes qui emplirent la nuit de leurs échos. Au matin, il se renseigna au super-marché. La nouvelle était sur toutes les lèvres. Une jeune femme était morte la nuit même, d’une crise cardiaque ou d’une rupture d’anévrisme, sans qu’on sache au juste comment, et pourquoi. Comme c’était triste ! Elle avait à peine quarante ans et son fils, qu’elle venait juste de retrouver, était inconsolable.

    L’homme qu’il venait d’interroger opina du chef. Il s’enfuit, ne pouvant soutenir son regard. Enfourcha son scooter et chercha un endroit approprié, le plus isolé possible, se laissant bercé par le ressac des vagues. Sur la plage, il attendit la nuit. Relut la lettre et comprit sa fatale erreur. Entre des branches lianes qui couraient sur le sable fin, loin des regards, il se glissa, attira à lui son sac. Et le fouilla à l’aveuglette, des larmes noyant ses yeux. Il attrapa une seringue, le flacon de mort et en aspira ce qui restait de liquide. Quelques gouttes. Chercha la veine fatidique et se piqua. Espérant que sa mort serait aussi douce que celle de sa bien aimée.

    Il se réveilla à l’hôpital, sous haute surveillance.
    Un enfant, qui cherchait sa balle, le découvrit au matin. Entre la vie et la mort. On le ranima, retrouva la lettre de Clément dans sa poche, le flacon vide, la seringue. On comprit. On identifia le produit. On rapprocha sa présence dans ces fourrés, de la mort inexpliquée de la jeune femme, et les déductions du juge firent le reste.
    Il écopa de vingt ans. Sans remise de peine. La mort eût été trop douce pour lui !

     

    FIN






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