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Conte : Payel le lutin
25/12/2007 10:08
Payel le lutin 
A Bourg-des-Comptes, où il est appelé Payel, Maître-Jean est accusé d’avoir tué un homme. Cette accusation nous étonne, car c’est le seul crime qu’on lui reproche. Voici d’ailleurs ce qu’on nous a raconté :
A mi-côte du chemin étroit et tortueux qui descend de Bourg-des-Comptes au gracieux village de la Courbe, situé sur le bord de la Vilaine, on rencontre une sorte de carrefour appelé dans le pays : Les Trois Barrières. Cet endroit, au premier abord, n’a rien de mystérieux. Les trois barrières n’inspirent pas la moindre défiance : l’une est à gauche et les deux autres à droite de la route.
Le jour, les moins braves y vont sans crainte, mais la nuit, quand les troncs des vieux chênes prennent des aspects fantastiques, quand on entend le gémissement du vent dans les sapins du bois des Rondins, ou le bruit lugubre de la rivière, tombant d’un bief dans l’autre, par-dessus la chaussée, les plus braves ont peur.
Les filles du bourg ou du village ne passent qu’en tremblant, et les gars pressent le pas, sifflent un air de noce ou entonnent une chanson de conscrit pour se donner du cœur c’est que les trois barrières, voyez-vous, n’ont pas bonne renommée, tant s’en faut !
— Pourquoi ?
— Ah ! pourquoi ?
Parce que c’est l’endroit choisi par Payel pour jouer des tours au pauvre monde.
Si vous voyez, vers minuit, sur un talus ou dans un creux de fossé, une bête blanche, chien ou chat (on n’est pas bien sûr), qui vous regarde fixement avec des yeux de feu qui vous font froid dans le dos, méfiez-vous, c’est Payel. On ignore qui il est, et d’où il vient. Les uns pensent que c’est le diable qui prend cette forme pour tourmenter les gens (ça se pourrait ben, le gars n’est point gauche et il en est ben capable). Les autres croient que c’est une espèce de mauvais génie, d’esprit malfaisant, une manière de sorcier.
Un homme du village de la Courbe, qui était venu travailler à Bourg-des-Comptes, retournait chez lui, sa journée faite, quand par malheur, il rencontra Payel aux trois barrières. Le failli chien se jeta sur lui, l’étrangla et l’emporta.
Le lendemain on vit des traces de lutte, et un chat gris pendu à un pommier. Quant au pauvre homme, on n’en entendit plus jamais parler. D’autres assurent qu’on retrouva auprès d’une des barrières, son chapeau et ses sabots.
Ces choses-là ne sont point faites pour vous rassurer. Heureusement que Payel n’est pas toujours aussi méchant. Il peut arriver même qu’il vous laisse aller tranquillement en se contentant de vous regarder d’une façon inquiétante à travers les feuilles. Mais plus souvent il commence par vous faire quelques niches. Il vous fait buter contre un caillou, ou vous jette votre chapeau à terre,et vous tire les cheveux quand vous passez sous une branche. Oh ! ne vous rebiffez pas ! Oh ! ne vous mettez pas en colère contre lui ; n’essayez même pas de l’intimider par des gestes ou des menaces ; ne l’insultez pas et, surtout, n’allez pas l’appeler Payel, ou malheur à vous. 11 se jettera dans vos jambes, vous fera tomber, vous cognera contre les arbres, vous entortillera dans les ronces et vous choquera la tête contre les pierres du chemin.
Il n’y a qu’un moyen de lui plaire ; mais il y en a un. Le croirait-on ? Il est sensible à la flatterie. Si jamais vous le rencontrez sur votre chemin, une nuit que vous vous serez attardé, ne vous effrayé pas, ne faites pas le Monsieur, tirez-lui ben joliment vot’bounet ou vot’chapiau, et dites-lui, poliment, de votre plus douce voix : « Bonjour Jeannette. Oh ! que tu es gentille ! viens ma belle Jeannette. » Cela lui suffit, il ne vous en demande pas davantage. Appelez-le Jeannette et il est heureux. Quand vous lui aurez donné ce nom qu’il aime, vous pourrez errer sans crainte, et rester par les chemins à toute heure de jour et de nuit.
Aujourd’hui les jeunes gens se font gloire de ne plus croire ce que disent les vieux, mais combien y en a-t-il, à la Courbe, gars et filles, de ceux qui font les braves à midi, et rient de tout ce qu’on voit dans les ténèbres, qui ne passeraient pas, à minuit, aux trois barrières, sans trembler comme des feuilles de peuplier.
FIN
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Conte : La bête du château
25/12/2007 10:11
La bête du château
Le château de la Lohière, en Loutehel, dans l’arrondissement de Redon, possédait autrefois quatre grandes tours munies de moulins à grains. Entouré de fortifications, de bois, d’étangs et de deux larges douves, avec pont-levis, ce château était réputé imprenable.
Une fois cependant, il faillit tomber entre les mains des assiégeants : l’ennemi avait gagné l’un des gardes de la Lohière, et lui avait fait promettre de placer une lanterne, sur le faîte de la plus haute tour.
Le soir indiqué, le garde, rongé de remords pour sa trahison, eut recours à un stratagème qui eut plein succès : il alluma la lanterne, mais au lieu de la mettre à la place convenue il la hissa au haut d’un grand alizier qui reçut tous les coups. Quand le flambeau fut éteint, les agresseurs, croyant être maîtres du château, se disposaient à y entrer, lorsque, tout à coup, les assiégés les attaquèrent par dernière et les jetèrent dans les étangs.
Plus tard, la Lohière fut possédée par Mlle Jeannette de la Piphardière, une belle fille dans son temps, paraît-il, mais aussi méchante qu’elle était jolie.
Jeannette s’en allait toujours escortée de deux chiens, grands comme des génisses, qu’elle excitait et lançait sur les personnes qui lui déplaisaient et qui ne tardaient pas à être dévorées par les molosses.
Les étrangers ou les malheureux qui se permettaient d’entrer au château sans la permission de Mlle de la Piphardière ne reparaissaient plus dans le pays. Ils étaient ou mangés par les chiens ou jetés dans les étangs quand les animaux étaient repus.
Cette femme était, en un mot, la terreur de la contrée.
A une lieue de la Lohière se trouvait le château de Querbiquet, habité par une autre demoiselle de la Piphardière, sœur de la précédente, mais qui était, elle, une véritable sainte. On eût dit qu’elle avait été créée et mise au monde pour racheter les fautes de sa sœur.
La châtelaine de Querbiquet invita, un jour, la belle Jeannette à dîner chez elle. Celle-ci s’y rendit emmenant avec elle nombreuse et brillante société ; mais lorsqu’elle vit que les invités de Querbiquet étaient les pauvres du pays, elle entra dans une colère extrême, injuria sa sœur et partit précipitamment en jurant de ne jamais la revoir.
Fort heureusement pour les convives déguenillés, Jeannette avait laissé ses chiens à la maison.
A quelque temps de là, la méchante fille mourut à la grande satisfaction de tous ; mais comme sa vie avait été trop courte pour faire le mal, qu’elle avait projeté, elle continua longtemps, après sa mort, à faire de là misère au pauvre monde.
Elle est revenue pendant des siècles sous toutes les formes d’animaux.
Un charretier allait-il chercher son cheval à la pâture, aussitôt qu’il l’avait enfourché, la bête partait à fond de train vers l’étang du Loup-Borgnard dans lequel elle se précipitait et disparaissait. Aucun obstacle ne pouvait l’arrêter. On la voyait bientôt reparaître sur la rive opposée en riant aux éclats, pendant que le cavalier se noyait s’il ne savait nager.
Cet étang du Loup-Borgnard, qui existe toujours, est, dit-on, sans fond. Un pauvre diable qui y avait été jeté par Jeannette de la Piphardière y resta trois jours. Il y rencontra des monstres affreux qui le poursuivirent jusque sous le bourg de Loutehel. Ce ne fut que le soir du troisième jour qu’il put leur échapper, et qu’il revint à la surface du lac.
Lorsqu’un pâtre allait chercher ses bêtes aux champs, il devait prendre de grandes précautions pour les ramener sans les frapper, car s’il avait le malheur de toucher du fouet ou de la gaule la bête de la Lohière, cachée sous la peau de l’un de ces animaux, elle le rouait de coups et le laissait gisant par terre mort ou évanoui.
Les charretiers et les pâtres n’étaient pas seuls à rencontrer Jeannette ; toutes les personnes voyageant la nuit étaient exposées à la voir tantôt sous une forme, tantôt sous une autre.
Un soir, Moinard, le sacristain de Lou tehel, trouva dans le bourg, près du cimetière entourant l’église, un mouton qui lui barra le passage. Las de pousser inutilement devant lui cet animal qui s’obstinait à rester en place, le sacristain lui asséna un coup de bâton sur le dos. Mal lui en prit : le mouton, qui semblait tout petit, s’allongea soudain, grossit à vue d’œil, s’élança sur l’homme, lui posa les pieds de devant sur les épaules en cherchant à l’écraser de son poids qui devenait de plus en plus lourd.
« C’est la Piphardière », pensa Moinard, et comme il avait entendu dire qu’elle n’avait plus aucun pouvoir dans le cimetière, à cause de la sainteté du lieu, il s’en approcha insensiblement, et parvint bientôt à franchir la pierre qui l’en séparait. En effet le mouton s’enfuit ; mais chaque fois que le sacristain cherchait à sortir, soit d’un côté, soit d’un autre, il rencontrait toujours le bélier qui lui montrait ses cornes. Force lui fut de passer la nuit au milieu des tombes.
Jeannette se promenait aussi souvent dans les appartements du château de la Lohière, où elle éteignait les lumières, enlevait les couvertures des lits, jetait les dormeurs par terre, ou frappait ceux qui, le jour, s’étaient moqués d’elle.
Il y avait cependant un moyen d’éviter ses maléfices, et, pour cela, il suffisait de lui adresser des compliments. Elle était sensible aux louanges. Si, au lieu de l’injurier, on lui disait bien gentiment : « Te voilà, belle Jeannette, laisse-moi, ne me fais pas de mal, je t’aime bien, je suis ton ami, etc. » ; alors elle s’en allait tranquillement, ou même s’employait à votre service si vous en aviez besoin.
Sa rage est aujourd’hui assouvie. On n’entend plus parler d’elle, il n’y a guère que les ivrognes, revenant des foires et des marchés, qui affirment l’avoir rencontrée. Mais les habitants de Loutehel, et même de tout le canton de Maure, vous déclareront, quand vous voudrez, que leurs pères ou grands-pères ont été maltraités par la bête de la Lohière, il n’y a pas plus de cinquante ans.
FIN
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Conte : Petit Jean
25/12/2007 10:13
Petit Jean
La mère Bouillaud, du Fretay, en Pancé, me disait un jour : « Tout est bien changé chez nous, depuis quelques années. Autrefois, Petit Jean était notre ami ; s’il promenait nos chevaux au clair de lune il les soignait ben. Le matin, ils étaient lavés, étrillés, le crin tressé. Tandis qu’aujourd’hui, à l’exception de celui qu’il aime, les autres sont maigres comme des coucous et n’ont plus de courage. Il les fait galoper tout le long des nuits et les rend fourbus. Autrefois, quand j’allais à la messe, c’était lui qui attisait le feu pour faire bouillir la soupe, et souvent, en rentrant, je trouvais mon ménage fait, mes meubles frottés, ma batterie de cuisine brillante comme le soleil.
« Ah ! oui, tout est ben changé ! A cette heure il tête nos vaches, met le cidre à couler dans les celliers, saigne les poulets, éparpille le grain dans les greniers et, avec cela le gredin, pourvu qu’il ne m’entende pas, nous joue des tours à nous faire mourir de honte ! »
— Mais il doit y avoir un motif pour qu’il ait ainsi changé. Que lui avez-vous fait ?
— Ah ! voilà : il y a environ six ans ; c’était, si j’ai bonne mémoire, le dimanche de la Chandeleur ; le valet de ferme était à l’enterrement de sa mère, et notre homme alla coucher à sa place dans l’écurie pour veiller sur les chevaux.
Le lit est accroché au mur, à une certaine hauteur, et, pour y monter, il faut se servir de l’échelle qui conduit au grenier où l’on ramasse le foin.
Le bourgeois fut donc pour prendre l’échelle, lorsqu’il vit sur un des barreaux un gros chat qui dormait. Il eut le malheur de saisir un fouet qui se trouvait à sa portée et de lui en allonger deux ou trois coups sur les reins en criant : « Au chat ! au chat !
Le lendemain, le valet n’étant pas de retour, notre homme coucha encore dans l’écurie. Quand il eut ôté ses vêtements, et qu’il ne lui resta plus que sa chemise sur le corps, il reçut deux vigoureux coups de fouet sous les jarrets et il entendit en même temps quelqu’un qui criait : « Au chat ! au chat ! » Il en eut presqu’une faiblesse, se fourra vivement sous les couvertures où il trembla de peur jusqu’au matin.
— Eh bien ! Puisque Petit Jean a rendu la correction qui lui avait été donnée, il devrait bien vous laisser tranquilles.
— Nenni ben sûr ! Il nous fait mourir de honte, j’vous dis.
— Mais comment cela ?
— J’mariimes notre fille v’la deux ans. Quand elle se rendit au marché de Bain pour acheter ses hardes, elle trouva sur la route un bel écheveau de soie noire, « Bonne trouvaille, dit-elle, cette soie servira à coudre ma robe de noce. »
Elle la donna à sa couturière qui en eut assez pour coudre la robe et le cotillon, et qui déclara n’avoir jamais eu de soie meilleure et plus solide.
Le jour de la noce, en sortant de l’église, au milieu du bourg, v’la la robe et le cotillon de la mariée qui tombent en morceaux. La soie avait fondu et notre pauvre fille se trouvait en chemise devant tout le monde. J’en rougis encore, rien que d’y penser. Croiriez-vous que les invités eux-mêmes riaient à se tenir les côtes ? Je les aurais ben battus ! Les étrangers, les gamins, passe encore, mais les invités, je ne leur pardonnerai jamais ça. Ma pauvre fille se sauva en pleurant, chez une amie qui lui faufila sa robe, et nous revînmes à la ferme ben attristés d’un pareil affront ! »
Aux vacances suivantes, je retournai visiter les ruines du château du Fretay, et j’allai, selon mon habitude, dire bonjour à la mère Bouillaud.
Après avoir causé avec elle pendant un instant, je lui dis tout bas dans l’oreille : « Et Petit Jean que devient-il ? » À mon grand étonnement la figure de la bonne femme s’illumina et elle me répondit : « Nous en sommes débarrassés, Dieu merci ! »
— Comment avez-vous fait ?
Elle me prit par la main, m’obligea à m’asseoir et me fit le récit suivant :
« Une nuit, notre garçon d’écurie fut réveillé par un bruit de porte qui s’ouvrait et se refermait. Il mit la tête hors du lit, et, à la clarté de la lune, vit un petit nain, pas plus gros qu’un lièvre qui attachait un cheval au râtelier. La pauvre bête était couverte de sueur et d’écume ; mais son cavalier l’essuya, l’étrilla, la lava, s’en fut prendre dans un coffre un picotin d’avoine qu’il mit devant elle dans la mangeoire, puis le nain prit tout le foin des autres chevaux et le porta à son préféré.
« Quand celui-ci fut bien soigné, Petit Jean car c’était lui, se changea en grillon, et s’en alla par le trou de la serrure.
« Je te pincerai, dit notre valet, qui n’est point bête.
« En effet, le lendemain soir, il introduisit dans la serrure des graîtes, c’est-à-dire de la poussière de lin broyé, qui est comme vous savez d’une finesse extrême.
« Quand Petit Jean, toujours sous la forme d’un grillon, voulut pénétrer dans l’écurie pour aller faire sa promenade à cheval, il jeta par terre des milliers de graîtes qu’il fut obligé de ramasser, car c’est là la punition des lutins. Il y passa la nuit en trépignant de rage, et ne put pas en venir à bout avant le premier chant du coq. Depuis ce moment il a quitté la ferme. »
— Où est-il allé ?
— Au village du Bignon-Gémier.
— Et là que fait-il ?
— Des tours pendables. Écoutez plutôt :
« Désirée Hurel revenait d’en champ, avec ses vaches, lorsqu’elle trouva, en traversant une pâture, un peloton de laine. Elle le ramassa, ben contente, en disant : « J’ai là de quoi faire une bonne paire de bas pour cet hiver. »
« Tout le long du chemin elle regardait son peloton qui, chose étonnante, grossissait grossissait, et devenait plus lourd. En arrivant au Bignon-Gémier, le peloton pesait plus de cinq livres.
« Elle le déposa sur un bout de table, et un instant après, quand elle fut pour le reprendre, elle mit la main sur un gros chat qui riait de l’air effaré de la jeune fille.
« Désirée poussa un cri, les voisins accoururent, mais le chat avait disparu, et le peloton de laine aussi.»
FIN
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